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vendredi 30 mai 2025

Visa Schengen : Près de 70 millions de dollars perdus par les Africains en 2024, un système jugé discriminatoire

En 2024, les ressortissants africains ont perdu près de 70 millions de dollars en frais de visa Schengen non remboursés, un chiffre alarmant qui révèle l’opacité et l’iniquité du système. Le Nigeria, à lui seul, a enregistré plus de 5 millions de dollars de pertes, selon les données du collectif LAGO (Let Africans Go), qui dénonce un traitement injuste réservé aux candidats africains.

Des taux de rejet alarmants

Selon le rapport publié par LAGO, les pays comme le Nigeria, le Sénégal et le Ghana présentent des taux de rejet oscillant entre 40 % et 50 %, bien au-dessus de la moyenne mondiale. Des centaines de milliers de demandeurs ont vu leur dossier refusé malgré la fourniture de documents complets et la satisfaction apparente des critères.

« Ces chiffres sont la preuve d’un système profondément déséquilibré, » déclare Fatoumata Diop, analyste de politiques migratoires chez LAGO. « Lorsqu’un demandeur européen obtient une réponse favorable dans 90 % des cas, mais qu’un Africain est systématiquement recalé sans justification crédible, on ne peut plus parler de coïncidence. »

Une machine à perdre pour les demandeurs africains

Les frais de visa Schengen, fixés à 80 euros pour les adultes, ne sont ni remboursables ni transférables, même en cas de rejet. Pire, depuis juillet 2024, ces frais ont été augmentés à 90 euros, alourdissant davantage le fardeau financier pour des demandeurs déjà vulnérables économiquement.

« C’est une double peine : non seulement vous êtes rejeté sans motif clair, mais vous devez encore payer pour espérer une deuxième chance, » confie Ousmane, un étudiant sénégalais dont la demande a été refusée trois fois en 18 mois.

Une opacité inquiétante

La majorité des refus sont délivrés sans explications détaillées, rendant toute procédure de recours difficile. Si certains ont réussi à obtenir gain de cause devant les juridictions locales ou européennes, la grande majorité des demandeurs abandonnent, faute de moyens ou de conseils juridiques.

Cette opacité alimente les critiques contre un système qualifié de « discriminatoire et arbitraire » par plusieurs ONG et acteurs de la société civile africaine.

Surveillance accrue ou préjugés systémiques ?

Les autorités européennes justifient cette rigueur par les risques de dépassement de séjour, invoquant les statistiques de migration irrégulière. Toutefois, selon les défenseurs des droits des migrants, cette position camoufle une approche stigmatisante qui pénalise injustement des voyageurs légitimes.

« Tous les Africains ne veulent pas fuir leur continent. Beaucoup veulent simplement voyager, étudier, échanger, » plaide LAGO dans son communiqué. « Mais le système actuel ne leur en donne même pas la possibilité. »

Appel à une réforme équitable

Face à ces constats, LAGO et d’autres organisations appellent à :

  • Une plus grande transparence dans les motifs de refus ;
  • Un mécanisme de remboursement partiel en cas de rejet ;
  • Une harmonisation des pratiques consulaires dans les ambassades européennes en Afrique ;
  • La réduction des frais de visa pour les pays à faibles revenus.

Sans réforme, le visa Schengen continuera d’être perçu non comme un outil de coopération, mais comme une barrière à la mobilité et à l’équité.

Xolomo Tokpa

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