Kinshasa, 20 mai 2025 – Le couperet de la justice est tombé dans l’un des procès les plus emblématiques de la lutte contre la corruption en République démocratique du Congo. L’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo a été condamné ce mardi à 10 ans de travaux forcés pour détournement de deniers publics, à l’issue d’un procès très attendu par l’opinion nationale et internationale.
La Cour de cassation a en outre ordonné la confiscation de l’ensemble de ses biens, en proportion de la somme détournée, estimée à plus de 240 millions de dollars américains. Ce verdict marque une étape décisive dans la volonté des autorités congolaises de rendre des comptes sur des décennies de mauvaise gouvernance.
Outre Matata Ponyo, deux autres accusés ont également été reconnus coupables dans cette affaire tentaculaire :
- Déogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque Centrale du Congo, a lui aussi été condamné pour détournement de fonds publics.
- Le ressortissant sud-africain Christophe Krobler, impliqué dans les mécanismes de ce détournement, a écopé de 5 ans de travaux forcés, assortis d’une expulsion définitive du territoire congolais.
Ces peines viennent conclure un procès centré sur les fonds alloués au projet agro-industriel de Bukanga-Lonzo, qui devait être un modèle de développement agricole mais s’est transformé en gouffre financier.
L’affaire Matata Ponyo est considérée comme un test de crédibilité pour l’appareil judiciaire congolais, souvent accusé de laxisme face aux crimes économiques d’envergure. En condamnant un ancien chef de gouvernement, la justice tente d’envoyer un message clair : nul n’est au-dessus des lois.
Cette décision fait également écho aux engagements du président Félix Tshisekedi en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption, à l’approche de nouveaux scrutins électoraux.
Augustin Matata Ponyo a été Premier ministre de la RDC de 2012 à 2016. Durant son mandat, il avait supervisé plusieurs projets de grande envergure, dont le controversé projet Bukanga-Lonzo, qui a mobilisé plusieurs centaines de millions de dollars sans résultats tangibles. Ce projet avait été dénoncé comme un échec cuisant et une opération de détournement planifié par plusieurs rapports parlementaires et ONG.
Aucune réaction officielle n’a encore été enregistrée de la part de Matata Ponyo ou de ses avocats à l’heure de la publication de cet article. Toutefois, des proches de l’ancien Premier ministre dénoncent déjà une justice instrumentalisée et évoquent un procès politique.
Sur les réseaux sociaux, les réactions sont partagées : certains saluent une décision historique, d’autres mettent en doute l’issue du procès dans un contexte jugé encore trop permissif pour les élites corrompues.
Xolomo Tokpa
