Alors que le Conseil constitutionnel camerounais a clos, mercredi, l’examen des recours liés à la présidentielle du 12 octobre, Issa Tchiroma Bakary, candidat du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), a lancé un nouvel appel à la mobilisation nationale.
Depuis Garoua, sa ville natale, dans le nord du pays, l’ancien ministre de la Communication a diffusé une vidéo sur sa page Facebook, réaffirmant avoir remporté le scrutin « avec une marge écrasante » et accusant le pouvoir en place de vouloir lui « voler » sa victoire.
Dans ce message empreint de gravité et de ferveur patriotique, il s’est adressé directement à ses compatriotes : « Mes chers compatriotes, l’heure est grave. Nous n’accepterons pas de nous faire voler notre victoire. S’ils préfèrent menacer la sérénité et la paix du pays plutôt que d’admettre la défaite, nous répondrons par la détermination pacifique du peuple. J’invite tous les Camerounais, du nord au sud, de l’est à l’ouest, et partout où vous résidez dans le monde, à sortir comme un seul homme, dans la paix et dans l’amour de la patrie. Marchons pour la libération et pour la revendication de notre victoire. »
Ce discours, largement relayé sur les réseaux sociaux, s’inscrit dans une logique de résistance non violente. Tchiroma, qui affirme détenir des résultats couvrant près de 80 % du corps électoral, rejette toute proclamation en faveur du président sortant Paul Biya, 92 ans, au pouvoir depuis plus de quarante ans.
Huit recours rejetés par le Conseil constitutionnel
Quelques heures avant cette déclaration, le Conseil constitutionnel avait rejeté l’ensemble des huit recours introduits en contentieux électoral, ouvrant la voie à l’annonce officielle des résultats prévue pour le lundi 27 octobre.
Selon les juges, la majorité de ces recours avaient été déposés hors délai ou jugés non conformes. Le seul dossier examiné sur le fond, celui de Tomaïno Ndam Njoya, candidat de l’Union démocratique du Cameroun (UDC), a été déclaré irrecevable faute de preuves.
Les autres candidats, Joshua Osih (SDF) et Cabral Libii (PCRN), ont retiré leurs plaintes sans en préciser les raisons, laissant Issa Tchiroma Bakary seul dans sa contestation du processus électoral.
Réactions mesurées du gouvernement
La sortie médiatique du candidat du FSNC n’a pas provoqué de réaction officielle majeure. Le ministère de la Communication l’a qualifiée de « non-événement ». De son côté, Grégoire Owona, ministre du Travail et secrétaire général adjoint du RDPC, a estimé que Tchiroma « prend l’élection présidentielle pour une plaisanterie » :
> « Il n’a pas pu apporter les éléments ni à la Commission centrale, ni au contentieux. Je lui rappelle que ce sont ces instances qui décident de ce qui se passe à l’élection présidentielle. »
Pour le parti au pouvoir, le processus électoral suit son cours normal, et les appels à la mobilisation lancés par l’opposition ne devraient pas interférer avec la proclamation des résultats.
Un climat tendu dans le nord du pays
À quelques jours de cette échéance, la tension monte dans plusieurs villes du nord, bastions de Tchiroma. Des manifestations sporadiques ont été signalées à Garoua et Maroua, parfois dispersées par les forces de l’ordre.
Bien que le candidat du FSNC répète vouloir maintenir son combat dans un cadre strictement pacifique, ses déclarations traduisent la crainte d’un affrontement politique plus profond entre les institutions et la rue.
La date du 27 octobre s’annonce ainsi comme un moment décisif pour le Cameroun, partagé entre l’attente des résultats officiels et la montée des frustrations dans une partie de l’opinion.
Facinet Soumah

