Selon une enquête de l’agence Associated Press, du matériel militaire russe destiné au Mali passerait par le port de Conakry.
En dépit des sanctions imposées à Moscou, des navires russes déchargent du matériel militaire en Afrique, notamment dans l’ouest du continent, pour appuyer l’Africa Corps selon Associated Press. A en croire une enquête de l’agence, le matériel, destiné au Mali, passerait par le port de Conakry. Un transit qui étonne alors que les militaires au pouvoir en Guinée semblent être dans une logique de maintenir des relations cordiales avec les occidentaux, notamment la France.
Une question de bonne relation
Le Baltic Leader (8 800 tonnes) et le Patria (5 800 tonnes) sont deux navires qui font partie des centaines d’autres que les pays occidentaux ont sanctionnés pour bloquer les ressources nécessaires à la guerre de la Russie en Ukraine.
Pourtant, selon une enquête menée par l’Associated Press, ces deux navires ont accosté, à la fin du mois de mai, à Conakry, en Guinée, pour décharger du matériel militaire.
Dans le même port, plus tôt, en janvier, d’autres navires auraient effectué des livraisons de chars, de véhicules blindés et d’autres matériels de fabrication russe qui ont ensuite été acheminés par voie terrestre vers le Mali, voisin de la Guinée.
Rien de surprenant, selon Seidik Abba, spécialiste des questions sahéliennes, chercheur associé et président du Centre international d’études et de réflexions sur le Sahel (Cires). Il rappelle que « la Russie a toujours eu de bonnes relations avec la Guinée« .
Un politologue de la région, contacté par la DW, assure avoir lui-même croisé, le mois dernier, des blindés venant de Conakry, en partance pour Bamako. Selon lui, le transit de matériel militaire russe pour le Sahel, via la Guinée, est un secret de Polichinelle à Conakry.
Tout en s’interrogeant sur la position de Paris dans cette affaire, il estime que la France laisse faire pour « ne pas perdre la Guinée ». Pour rappel, l’armée française a été poussée vers la sortie au Mali et au Niger.
Pour l’heure, entre Conakry et Paris, tout semble aller pour le mieux. Récemment, dans un décret lu à la télévision nationale (le 1er juin 2025), le général Mamadi Doumbouya, le chef de la junte au pouvoir, a même décerné la médaille militaire or, dans l’ordre national du Mérite, à deux militaires français.
Selon le décret présidentiel, cette distinction récompense « les services louables rendus à la nation guinéenne« .
Un port stratégique
Tout en précisant que « Conakry a toujours adopté une position prudente entre les Occidentaux et la Russie, l’analyste Kabinet Fofana rappelle par ailleurs l’importance stratégique du port de Conakry. Un port qui « a toujours servi de port d’approvisionnement du Mali ».
Selon toujours l’expert si l’occident, la France notamment, ne réagit pas c’est sans doute qu’il « n’y voit pas une quelconque (mauvaise) intention de la Guinée. Surtout, parce que ces armes qui passent, c’est seulement d’un point de vue commercial (…). »
Selon lui, il y a donc « des raisons économiques et aussi des raisons stratégiques… de ne pas frustrer un pays qui est connu pour être non-aligné ».
La Guinée a toutefois toujours affiché une certaine solidarité vis-à-vis de son voisin malien. En 2022, lorsque les autorités militaires maliennes ont annoncé vouloir prolonger la transition de six mois à cinq ans, la Guinée n’a pas fermé ses frontières, ou suspendu ses échanges commerciaux avec le Mali, contrairement à d’autres pays de la sous-région.
Contactées, les autorités guinéennes disent « étudier les éléments de langage » à utiliser, avant de réagir.