Bamako, Mali – Le gouvernement de transition malien a officiellement lancé, ce mardi, les travaux de construction d’une raffinerie d’or de grande capacité dans la région de Bamako. Ce projet, réalisé en partenariat stratégique avec le groupe russe Yadran, représente bien plus qu’un simple développement industriel : il symbolise une volonté affichée de rupture économique et géopolitique avec les anciennes puissances coloniales.
Une raffinerie pour traiter 200 tonnes d’or par an
Prévue pour être opérationnelle d’ici 2026, cette raffinerie devrait pouvoir traiter jusqu’à 200 tonnes d’or par an. Jusqu’à présent, le Mali – troisième producteur d’or en Afrique – exportait la quasi-totalité de sa production sous forme brute vers l’étranger, privant ainsi le pays d’une part significative de la chaîne de valeur.
Avec cette infrastructure, Bamako compte garder le contrôle sur la transformation de son principal produit d’exportation, tout en offrant un service régional aux pays voisins, comme la Guinée ou le Burkina Faso, eux aussi riches en ressources aurifères.
Une prise de contrôle étatique et un signal fort
Le président de la transition, le Général Assimi Goïta, a salué ce projet comme un « pas décisif vers la souveraineté économique », dans un discours au ton résolument anti-occidental. Depuis le coup d’État de 2021, son régime a multiplié les accords bilatéraux avec la Russie, tant sur le plan sécuritaire qu’économique, dans une logique de désengagement progressif de l’influence occidentale.
Dans ce contexte, des géants miniers comme le canadien Barrick Gold, historiquement implantés au Mali, voient leur présence contestée. Plusieurs opérations minières sont désormais sous contrôle étatique partiel ou total, dans le cadre d’une stratégie de « nationalisation progressive » des ressources.
Une raffinerie au cœur du nouvel axe russo-sahélien
Le partenariat avec Yadran Group n’est pas anodin. Il s’inscrit dans une tendance plus large de coopération russo-africaine, renforcée par la présence militaire du groupe Africa Corps, successeur de Wagner, dans la région. Pour la junte malienne, ce projet minier s’ajoute à une série d’initiatives visant à consolider un modèle alternatif de développement, moins dépendant des institutions financières occidentales.
Vers un hub régional de l’or ?
Au-delà de ses ambitions nationales, le Mali envisage de positionner cette raffinerie comme un pôle régional de traitement de l’or, attirant les productions des pays enclavés du Sahel. Une stratégie qui pourrait redessiner les circuits commerciaux de l’or en Afrique de l’Ouest et affaiblir la domination des places occidentales de raffinage comme Dubaï, Londres ou Zurich.
Xolomo Tokpa
