Une incursion de militaires guinéens sur le territoire sierra-léonais ravive les tensions frontalières entre les deux pays.
Selon plusieurs sources concordantes, des soldats guinéens auraient pénétré, le 28 avril dernier, dans la localité de Sokoma, en Sierra Léone, située à la frontière avec la Guinée. Lors de cette incursion, trois coups de feu auraient été tirés en l’air, semant la panique dans les villages voisins, notamment jusqu’à Yenga — une zone historiquement disputée depuis près de trois décennies.
Un citoyen sierra-léonais, Daniel Makoudou, témoigne au micro de Radio France Internationale (RFI) :
« On a entendu trois coups de feu. Les gens ont pris peur et se sont réfugiés dans les villages alentour. Le lendemain, les militaires guinéens ont interdit tout retour à Yenga », a-t-il déclaré.
Face à cette situation, les autorités de Freetown ont rapidement renforcé les mesures sécuritaires et apporté une aide humanitaire aux déplacés.
Un différend frontalier ancien
Le litige autour de Yenga remonte aux années 1990. À cette époque, en pleine guerre civile en Sierra Léone, Freetown avait sollicité l’aide militaire de Conakry pour sécuriser la zone. Depuis, les troupes guinéennes sont restées à Yenga, suscitant régulièrement des tensions.
Interrogé par Africaguinee.com, le colonel Aly Badara Camara, gouverneur de la région administrative de N’Zérékoré, a rappelé l’importance de préserver la stabilité dans cette zone sensible :
« Entre les deux pays, il y a eu des accords, des rencontres officielles. Ce n’est pas aujourd’hui qu’un citoyen peut remettre cela en cause. Les bornes sont là, les limites sont connues. Il faut empêcher toute infiltration susceptible de troubler la quiétude. C’est pourquoi j’ai inscrit Yenga dans mon agenda de visite », a-t-il précisé lors d’un déplacement à Guéckédou.
Freetown hausse le ton
De son côté, le ministre sierra-léonais des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Timothy Musa Kaba, a vivement réagi sur RFI.
« À chaque fois que nous engageons le dialogue au plus haut niveau, les Guinéens acceptent de se retirer. Mais dès que les diplomates rentrent dans leurs capitales respectives, ils reviennent à Yenga », a-t-il dénoncé.
Et d’ajouter avec fermeté :
« Cette fois-ci, nous exercerons une pression maximale. Ils doivent comprendre que Yenga appartient à la Sierra Léone, et que nous défendrons nos frontières. »
Vers une judiciarisation du conflit ?
La Sierra Léone envisage désormais de porter l’affaire devant les instances internationales, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union africaine (UA), voire la Cour internationale de justice.
Affaire à suivre.
Facinet Soumah

