Le 21 avril 2025, le pape François s’est éteint à l’âge de 88 ans, laissant derrière lui un pontificat marqué par l’humilité, la réforme et une attention particulière aux périphéries du monde. Avec sa disparition, l’Église catholique entre dans une période cruciale : celle du sede vacante, prélude au conclave chargé d’élire son successeur.
Et déjà, un scénario inédit nourrit les espoirs sur un continent longtemps en marge de la direction de l’Église : l’élection d’un pape originaire d’Afrique subsaharienne. Une première dans l’histoire moderne du catholicisme, qui suscite à la fois enthousiasme et prudence parmi les catholiques africains.
Un tournant historique en perspective
Le dernier pape africain, Gélase Ier, a été élu il y a plus de 1 500 ans, au Ve siècle, et il était originaire d’Afrique du Nord. Aucun souverain pontife n’a jamais été issu d’Afrique subsaharienne. Si cette élection venait à se concrétiser, elle représenterait un tournant monumental, à une époque où le catholicisme connaît une croissance rapide sur le continent.
Avec près de 250 millions de fidèles et des vocations en plein essor, l’Afrique est aujourd’hui l’un des moteurs démographiques et spirituels du catholicisme mondial. Pour beaucoup, il serait logique que cette vitalité soit enfin reflétée au sommet de l’Église.
Trois papabiles africains au centre des spéculations
À Rome, les regards se tournent vers plusieurs cardinaux africains qui figurent en bonne place parmi les papabiles, ces potentiels successeurs de Saint Pierre :
- Robert Sarah (Guinée) : Âgé de 79 ans, ce cardinal guinéen est une figure du conservatisme catholique. Ancien préfet de la Congrégation pour le culte divin, il est apprécié pour sa rigueur doctrinale, sa piété et son enracinement spirituel profond.
- Peter Turkson (Ghana) : Connu pour sa modération et sa capacité à dialoguer avec toutes les sensibilités, le cardinal Turkson a dirigé le Dicastère pour le Développement humain intégral. À 76 ans, il incarne une Église sociale, engagée, tournée vers les questions de justice et de dignité humaine.
- Fridolin Ambongo Besungu (République démocratique du Congo) : Archevêque de Kinshasa et franciscain, Ambongo est perçu comme une voix puissante pour les peuples d’Afrique. Engagé dans les combats pour la paix, la justice sociale et l’écologie, il bénéficie d’un solide réseau international et d’un profil de réformateur.
Espoirs et réserves sur le continent
Dans les églises, les paroisses et les médias africains, l’hypothèse d’un pape noir alimente débats et prières. « Ce serait une immense fierté pour nous, mais aussi une responsabilité redoutable », souligne une religieuse ivoirienne.
Cependant, les avis sont partagés. Certains craignent qu’un pape africain ne soit relégué à un rôle symbolique, sans pouvoir réel dans une Curie toujours très européenne. D’autres redoutent qu’il soit instrumentalisé dans les luttes internes de l’Église, entre les partisans de la réforme et les défenseurs de la tradition.
Une élection qui pourrait redéfinir l’universalisme de l’Église
Quel que soit le choix du conclave dans les semaines à venir, la présence d’Africains parmi les favoris représente déjà un signal fort. L’Église est de plus en plus universelle, portée par le dynamisme des communautés du Sud.
Un pape subsaharien incarnerait cette Église en mouvement, décentrée, plus proche des pauvres et des oubliés. Ce serait également un puissant symbole d’unité dans un monde de plus en plus divisé.
Le conclave à venir ne tranchera pas seulement entre des profils. Il dira aussi quelque chose de la vision que l’Église a d’elle-même — et de l’avenir qu’elle veut se donner.
Xolomo Tokpa