Kinshasa, juin 2025 – La République démocratique du Congo (RDC) tente une manœuvre diplomatique audacieuse : troquer l’accès à ses ressources minières stratégiques contre un soutien américain en matière de sécurité et de développement. Alors que les discussions s’intensifient, Kinshasa espère finaliser, d’ici la fin du mois de juin, un accord historique avec Washington. Ce dernier porterait sur un partenariat d’envergure impliquant les minerais critiques de la RDC, en échange d’investissements américains et d’un engagement pour contribuer à la résolution du conflit armé dans l’Est du pays.
Une diplomatie minière au service de la stabilité
Au cœur de cette proposition : les vastes réserves de cobalt, coltan et lithium dont regorge le sous-sol congolais, des matériaux essentiels à la transition énergétique mondiale et à la fabrication de batteries. Ces ressources, longtemps dominées par les intérêts chinois, font aujourd’hui l’objet d’une nouvelle géopolitique minière, où les États-Unis entendent bien s’imposer en partenaire alternatif – voire stratégique – face à Pékin.
Mais Kinshasa ne veut pas brader son potentiel minier : le gouvernement de Félix Tshisekedi exige en retour des investissements massifs dans les infrastructures, notamment dans les routes, l’énergie et les chaînes de transformation locale, ainsi qu’un soutien diplomatique et sécuritaire face à l’insécurité chronique qui mine l’Est du pays.
Le M23, point de bascule des négociations
Le véritable nœud du dossier reste cependant la rébellion du M23, active dans le Nord-Kivu, et soutenue selon plusieurs rapports de l’ONU par le Rwanda voisin. Kinshasa conditionne toute avancée vers un accord à un retrait effectif du M23 des territoires occupés et à un désengagement militaire rwandais.
Les États-Unis, tout en restant prudents, voient dans ce deal une opportunité double : endiguer l’influence chinoise sur le marché des minerais critiques tout en contribuant à la pacification d’une région longtemps négligée par la diplomatie internationale. Des discussions tripartites impliquant les États-Unis, la RDC et le Rwanda seraient en cours pour explorer les contours d’un cadre régional plus apaisé et coopératif.
Un pacte stratégique contre la Chine ?
Cet accord potentiel s’inscrit aussi dans une lutte géoéconomique entre Washington et Pékin. Aujourd’hui, plus de 70 % du cobalt congolais est extrait ou traité par des entreprises chinoises. Un changement de paradigme qui ouvrirait les portes à des acteurs américains pourrait rebattre les cartes du marché mondial, surtout si l’accord inclut la transformation locale du minerai pour créer de la valeur sur le continent.
La RDC, en quête de souveraineté économique, cherche à s’affranchir de sa dépendance à la Chine et à diversifier ses partenaires. Pour Washington, c’est l’occasion de renforcer son ancrage stratégique en Afrique et d’associer ses entreprises à un projet d’envergure, tout en promouvant les standards environnementaux et sociaux américains.
Les défis : gouvernance, transparence et sécurité
Malgré l’ambition de cet accord, plusieurs incertitudes subsistent. D’abord, la capacité de l’État congolais à garantir la sécurité des zones minières. Ensuite, la gouvernance du secteur extractif reste un défi majeur, avec des préoccupations persistantes sur la corruption, l’exploitation illégale et les droits humains dans les mines artisanales.
Enfin, la faisabilité d’un retrait rapide du M23 et des troupes rwandaises est loin d’être acquise. Le Rwanda, qui nie tout soutien à la rébellion, pourrait poser ses propres conditions, notamment sur la sécurisation de sa frontière ou sur la gestion des groupes armés congolais hostiles.
Conclusion : un accord aux multiples enjeux
L’accord en négociation entre la RDC et les États-Unis ne se limite pas à un simple échange « minéraux contre infrastructures ». Il s’agit d’un pacte de souveraineté, de paix et de repositionnement géopolitique. Kinshasa veut lier ses ressources naturelles à une stratégie de stabilité et de développement. Washington, de son côté, pourrait réaliser une avancée majeure dans sa compétition avec la Chine en Afrique.
Mais tout dépendra de la capacité des parties à désamorcer le conflit armé dans l’Est, à garantir un cadre d’investissement fiable, et à éviter que ce nouvel élan ne se heurte aux réalités chaotiques du terrain.
Le mois de juin s’annonce décisif. À la croisée des chemins, la RDC tente une négociation à très haut risque… mais au potentiel historique.
Xolomo Tokpa