L’Afrique est en pleine mutation démographique. Le continent connaît une croissance sans précédent de sa population, portée par des pays du Sahel comme le Niger, le Tchad et le Mali, malgré des conditions climatiques extrêmes, une insécurité persistante et une pauvreté structurelle. Cette dynamique, si elle est bien gérée, pourrait offrir une opportunité économique inestimable. Mais dans le cas contraire, elle risque de devenir une crise aux répercussions régionales et mondiales.
Une population en pleine expansion
Selon les projections de l’ONU, la population africaine devrait doubler d’ici 2050, passant de 1,4 milliard aujourd’hui à près de 2,5 milliards. Cette croissance est largement alimentée par l’amélioration des systèmes de santé qui a entraîné une baisse significative de la mortalité infantile, et une espérance de vie en hausse. Le Niger, par exemple, affiche un des taux de natalité les plus élevés au monde, avec près de 7 enfants par femme.
Un potentiel humain colossal
Cette explosion démographique pourrait représenter un dividende démographique : une majorité de jeunes, en âge de travailler, pourrait constituer une main-d’œuvre abondante, dynamique et propice à la transformation économique. En théorie, une telle population jeune offre une chance unique pour stimuler la croissance, développer les marchés intérieurs et favoriser l’innovation.
Mais un dividende conditionné à la gouvernance
Toutefois, pour que cette opportunité devienne réalité, encore faut-il que les États africains soient à la hauteur du défi. Or, dans plusieurs régions, la gouvernance reste défaillante. La corruption, les conflits armés, l’instabilité politique et l’incapacité à planifier sur le long terme minent les perspectives. À cela s’ajoute une crise aiguë de l’emploi : des millions de jeunes arrivent chaque année sur le marché du travail, sans perspectives, sans formation adéquate et sans industrie suffisamment développée pour les absorber.
Le risque d’une bombe sociale
L’Afrique du Sud, pourtant bien plus industrialisée que ses voisins du Sahel, est le théâtre d’un chômage des jeunes massif, supérieur à 45%. Ce chômage alimente frustration, criminalité, instabilité politique et, de plus en plus, pression migratoire vers l’Europe ou l’intérieur du continent. Dans les régions sahéliennes, les jeunes désœuvrés deviennent aussi une cible facile pour les groupes jihadistes ou les réseaux de trafiquants.
Le choix de l’avenir
L’Afrique est donc à la croisée des chemins. Si les gouvernements investissent dans l’éducation, la santé, les infrastructures, et s’ils encouragent un climat économique favorable à la création d’emplois, le continent pourra tirer parti de sa jeunesse pour se transformer en puissance économique du XXIe siècle. Dans le cas contraire, cette même jeunesse pourrait devenir le moteur de conflits, de migrations incontrôlées et de tensions géopolitiques croissantes.
Une responsabilité partagée
Les partenaires internationaux ont également un rôle à jouer. Coopérations intelligentes, investissements durables et partenariats équitables peuvent accompagner le continent dans cette transition démographique. Il ne s’agit pas d’une problématique purement africaine, mais d’un enjeu mondial, qui affectera l’économie, la sécurité et l’environnement planétaire.
En conclusion, l’explosion démographique de l’Afrique n’est ni une bénédiction automatique ni une malédiction programmée. Elle est une opportunité conditionnelle. Les décisions politiques prises aujourd’hui par les dirigeants africains détermineront si le continent peut transformer ce boom en levier de prospérité, ou s’il deviendra l’épicentre d’une crise humaine et sociale aux conséquences incalculables.
Xolomo Tokpa