Windhoek – Une reconnaissance historique. Ce mercredi marque un tournant majeur dans l’histoire de la Namibie : le pays célèbre pour la première fois une journée nationale de commémoration du génocide des Ovaherero et Nama, perpétré entre 1904 et 1908 par l’Allemagne coloniale.
Longtemps relégué aux marges des mémoires officielles, ce génocide est aujourd’hui qualifié par de nombreux historiens comme le premier génocide du XXe siècle. Près de 70 000 Africains ont été exterminés par les troupes coloniales allemandes, pour la plupart issus des communautés Ovaherero et Nama, qui résistaient à l’occupation allemande, au vol de leurs terres et de leur bétail.
« Ce n’est pas seulement une commémoration, c’est une restitution de dignité. »
– Déclaration du président namibien lors de la cérémonie officielle à Okakarara
Un génocide méthodique et prémédité
Près de quarante ans avant l’Holocauste, l’armée allemande a instauré une politique d’extermination massive dans l’actuelle Namibie, alors appelée Afrique du Sud-Ouest allemande. Les survivants furent internés dans des camps de concentration, où ils subirent faim, maladies, travail forcé et expérimentations pseudo-scientifiques.
Parmi les sites les plus tristement célèbres : l’île de Shark Island, qualifiée par certains de « précurseur d’Auschwitz », où des milliers de détenus périrent dans des conditions inhumaines.
Lente reconnaissance et appel à réparation
Après des décennies de déni et de silence, l’Allemagne a officiellement reconnu ce génocide en 2021. Toutefois, les réparations réclamées par les descendants des victimes tardent à se concrétiser. Le plan annoncé de 1,1 milliard d’euros, réparti sur 30 ans, a été largement critiqué par les communautés concernées pour son caractère unilatéral et insuffisant.
« La justice historique exige des réparations complètes, concertées et respectueuses de la mémoire des morts. »
– Chef traditionnel Nama, mercredi à Windhoek
Un tournant pour la mémoire africaine ?
La mise en place de cette journée nationale de commémoration ouvre une ère nouvelle pour la Namibie, et potentiellement pour le continent tout entier, où d’autres peuples réclament encore la reconnaissance de crimes coloniaux impunis.
C’est aussi un signal fort à destination de l’Allemagne, dont le devoir de mémoire est désormais attendu au-delà de l’Europe, là où l’Empire allemand a laissé des cicatrices profondes.
Xolomo Tokpa