En Afrique, les États-Unis opèrent un virage diplomatique majeur. Sous l’impulsion de l’administration Trump, Washington redéfinit ses priorités sur le continent : place aux affaires. Exit l’approche strictement diplomatique et sécuritaire. Désormais, les ambassades américaines se muent en véritables relais commerciaux destinés à promouvoir les intérêts économiques américains, au cœur d’un bras de fer stratégique avec la Chine.
« L’investissement commercial est désormais au cœur de l’action extérieure », déclare Christopher Landau, sous-secrétaire d’État américain.
Dans cette logique, les diplomates américains ne sont plus seulement évalués sur leur capacité à négocier ou à sécuriser des partenariats politiques, mais sur leur performance commerciale. Le message est clair : la diplomatie doit servir l’économie américaine, en facilitant l’accès des entreprises aux marchés africains.
Un réseau commercial au service du « business first »
Déjà, plus de 1 000 agents commerciaux sont déployés dans les ambassades des États-Unis à travers le monde, avec pour mission d’assister les entreprises américaines dans leur conquête des marchés étrangers. En Afrique, cette dynamique s’accélère, portée par la volonté de rattraper un retard considérable vis-à-vis de la Chine, acteur incontournable sur le continent.
« Nous sommes une administration prête à faire du business », insiste Landau.
Cette approche s’incarne dans le mot d’ordre désormais assumé par les responsables américains : « du commerce, pas de l’aide ». Le ton est donné : il s’agit de créer des partenariats gagnant-gagnant, fondés sur la compétitivité et les échanges mutuellement bénéfiques, non sur la philanthropie ou l’assistanat.
Un continent stratégique à fort potentiel
Troy Fitrell, haut responsable au Bureau des Affaires africaines, l’a rappelé lors de sa mission en Afrique de l’Ouest cette semaine : l’Afrique représente « le plus vaste potentiel inexploité au monde ». Avec une population estimée à 2,5 milliards d’habitants d’ici 2050 et un pouvoir d’achat en constante croissance (potentiellement plus de 16 000 milliards de dollars), le continent est au cœur des appétits commerciaux.
Pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes : les exportations américaines vers l’Afrique subsaharienne restent marginales, représentant moins de 1 % du commerce total de biens des États-Unis. Un paradoxe que Washington entend corriger par une présence économique plus agressive, mieux structurée et portée directement par ses représentations diplomatiques.
Un contrepoids à la Chine ?
Cette stratégie s’inscrit également dans un contexte géopolitique plus large. Face à une Chine omniprésente, investissant massivement dans les infrastructures, l’énergie ou les technologies, les États-Unis veulent rééquilibrer la donne. Non plus seulement avec des discours, mais avec des contrats, des investissements directs et un accompagnement actif des entreprises américaines.
La diplomatie économique de Washington en Afrique devient ainsi un levier majeur dans sa politique étrangère. Et les ambassades, bien plus que des centres consulaires, se transforment en « bases avancées » du commerce américain.
Xolomo Tokpa