28 C
Conakry
dimanche 7 décembre 2025

AFRIQUE : LA DERNIÈRE LETTRE DE LUMUMBA À SA FEMME PAULINE

Depuis la prison du camp Hardy, où il était détenu depuis début décembre 1960, Patrice Émery Lumumba, tout premier Premier ministre du Congo indépendant, a rédigé une ultime lettre à sa femme Pauline Opango, quelques jours avant son assassinat. Ce texte poignant, devenu historique, constitue aujourd’hui son véritable testament politique.

Lettre de Patrice Lumumba à Pauline Opango

Ma compagne chérie,

Je t’écris ces mots sans savoir s’ils te parviendront, ni quand, ni même si je serai encore en vie lorsque tu les liras. Tout au long de ma lutte pour l’indépendance de notre pays, je n’ai jamais douté, ne serait-ce qu’un instant, du triomphe final de la cause sacrée à laquelle mes compagnons et moi avons consacré notre vie.

Mais ce que nous voulions pour le Congo – son droit à une vie digne, à une indépendance sans entraves, à une souveraineté respectée – le colonialisme belge et ses alliés occidentaux ne l’ont jamais accepté. Ils ont trouvé des complicités, parfois délibérées, parfois inconscientes, jusque dans les rangs des Nations Unies, cet organisme en qui nous avions pourtant placé toute notre confiance.

Ils ont corrompu certains de nos compatriotes, déformé la vérité, et souillé notre indépendance. Mais que puis-je dire de plus ? Mort, vivant, libre ou emprisonné sur ordre des colonialistes, ce n’est pas ma personne qui importe. C’est le Congo. C’est notre peuple, humilié, trahi, et dont l’indépendance a été transformée en cage, observée de l’extérieur tantôt avec compassion hypocrite, tantôt avec cynisme.

Mais ma foi reste intacte. Je sais, je sens au plus profond de moi que, tôt ou tard, mon peuple se lèvera. Il chassera ses ennemis intérieurs et extérieurs. Il dira non à ce capitalisme honteux et retrouvera sa dignité sous un soleil nouveau.

Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie, les peuples libres et ceux en lutte dans le monde entier seront toujours aux côtés des millions de Congolais qui n’abandonneront la lutte que lorsque le dernier colonisateur et son mercenaire auront quitté notre sol.

À mes enfants que je laisse, et que je ne reverrai peut-être plus, je veux qu’on dise ceci : l’avenir du Congo est radieux. Il attend d’eux, comme de chaque Congolais, qu’ils accomplissent la tâche sacrée de reconstruction de notre souveraineté. Car sans dignité, il n’y a pas de liberté ; sans justice, il n’y a pas de dignité ; et sans indépendance, il n’y a pas d’hommes libres.

Aucune brutalité, aucun sévices, aucune torture ne m’ont fait renoncer à mes convictions. Je préfère mourir la tête haute, avec la foi inébranlable en l’avenir de mon pays, que vivre dans la soumission et le reniement des principes sacrés.

Un jour, l’Histoire dira son mot. Mais ce ne sera pas l’histoire écrite à Bruxelles, à Paris, à Washington ou à l’ONU. Ce sera celle que raconteront les peuples libres, affranchis du colonialisme et de ses pantins.

L’Afrique écrira sa propre histoire, une histoire de dignité et de gloire, du nord au sud du Sahara.

Ne me pleure pas, ma compagne. Moi, je sais que mon pays, si durement éprouvé, saura défendre sa liberté et son indépendance.

Vive le Congo ! Vive l’Afrique !

Patrice Lumumba

📌 Via : Les Panafricanistes

Dernières Infos
ARTICLES CONNEXES

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici