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jeudi 29 mai 2025

🔴 Résurgence de Boko Haram : pourquoi l’armée nigériane a du mal à tenir le coup

Depuis le début de l’année 2025, le nord-est du Nigeria est de nouveau le théâtre d’une série d’attaques violentes menées par le groupe djihadiste Boko Haram. Avant-postes militaires envahis, routes minées, villages incendiés : la terreur refait surface dans une région marquée par plus d’une décennie de guerre asymétrique. Pourtant, le gouvernement nigérian avait annoncé à plusieurs reprises que le groupe avait été « techniquement vaincu ». La réalité sur le terrain contredit dramatiquement cette affirmation.

Un conflit qui refuse de s’éteindre

Boko Haram, fondé en 2002 et entré dans la lutte armée en 2009, poursuit son objectif : éradiquer l’influence occidentale, notamment dans le domaine de l’éducation, et instaurer un califat régi par une interprétation radicale de la loi islamique (charia). En plus de 15 ans, le groupe a causé la mort de plus de 35 000 civils et provoqué le déplacement de plus de 2 millions de personnes, selon les Nations unies.

Loin de reculer, le groupe semble avoir retrouvé un second souffle. Les rapports des autorités locales font état d’embuscades contre les convois militaires, d’attaques coordonnées contre les bases de l’armée et d’exécutions sommaires dans les zones rurales. Une stratégie de harcèlement qui rappelle les heures les plus sombres du conflit.

Pourquoi l’armée nigériane peine à contenir la menace

1. Des moyens militaires limités et mal adaptés

Malgré un budget militaire conséquent, les soldats nigérians manquent souvent d’équipements modernes, de véhicules blindés fonctionnels et d’un soutien aérien constant. Les djihadistes, eux, utilisent des motos tout-terrain, des engins explosifs improvisés (EEI), et opèrent dans des zones difficiles d’accès, comme les forêts de Sambisa ou le lac Tchad.

2. La corruption au sein des forces de sécurité

Plusieurs enquêtes et rapports de défense pointent du doigt une corruption endémique qui gangrène les institutions militaires. Des détournements de fonds, des munitions revendues au marché noir, et des soldats mal payés ou démotivés affaiblissent l’efficacité de l’armée sur le terrain.

3. Un manque de coordination entre agences

La guerre contre Boko Haram implique l’armée régulière, les forces spéciales, les services de renseignement, mais aussi des milices civiles locales (comme les CJTF). Or, l’absence de coordination stratégique entre ces acteurs multiplie les failles sécuritaires.

4. L’impact des conflits parallèles

L’armée nigériane est également engagée sur d’autres fronts internes : conflits communautaires, banditisme armé dans le Nord-Ouest, tensions séparatistes dans le Sud-Est. Ces multiples fronts diluent ses capacités opérationnelles et logistiques.

Un climat de méfiance et de peur

Les communautés du Borno, de l’Adamawa et du Yobe vivent dans la peur constante. Certaines localités, « libérées » par l’armée, sont de nouveau sous la menace des insurgés, voire totalement réoccupées. Cette insécurité chronique entrave les efforts de reconstruction, de retour des déplacés et de développement socio-économique.

Le dilemme du gouvernement nigérian

Face à cette situation, les autorités continuent d’affirmer que « la situation est sous contrôle », sans fournir de preuves tangibles d’un recul de l’insurrection. Cette communication politique décalée alimente la défiance de la population envers le pouvoir central.

En parallèle, des discussions sur une réintégration ou amnistie pour certains combattants de Boko Haram divisent l’opinion publique, alors que les familles des victimes demandent justice.

Un retour au chaos de l’ère Boko Haram ?

La recrudescence des attaques depuis début 2025 fait craindre un retour au pic de violence observé entre 2014 et 2016. Le risque de contagion vers les pays voisins — Tchad, Niger, Cameroun — est réel, alors que l’instabilité régionale offre un terreau fertile aux idéologies extrémistes.

Conclusion

Le conflit contre Boko Haram n’est pas simplement une guerre contre une organisation terroriste. C’est un symptôme profond d’un État affaibli, d’un tissu social fragilisé et d’une gouvernance en crise. Tant que les causes structurelles ne seront pas traitées — pauvreté, corruption, marginalisation, éducation défaillante — Boko Haram, ou ses avatars, continueront de hanter le Nigeria.

Xolomo Tokpa

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